samedi 17 avril 2010

Augustin d'Hippone et la prostitution

(note pour l'article "les chrétiens et la prostitution"):

On prête souvent à Augustin la responsabilité de la tolérance fataliste des chrétiens vis à vis de la prostitution.
Deux citations attribuées à Augustin sont à l'origine de cette "rumeur" (selon le terme de Charles Chauvin).

Une première est tirée du traité "De l'ordre" (De Ordine II, IV, 12). Il s'agit d'un discours de rhétorique écrit par Augustin peu après sa conversion au christianisme, alors qu'il n'étais pas encore évêque, où il est question de maux évitant de maux plus grands (torture des bourreaux censé éviter le crime, prostitution censée éviter la débouche). On ne peut pas lui attribuer la même autorité que d'autres écrits d'Augustin, une fois devenu pasteur d'Hippone.

La seconde est citée par Ptolémée de Lucque: "Il [Augustin] dit que la femme publique est dans la société ce que la sentine est dans la mer et le cloaque dans le palais. Retranche le cloaque et tout le palais sera infecté." Or cette citation ne se trouve dans aucune des oeuvres d'Augustin qui nous sont parvenus (d'après Charles Chauvin). C'est aussi la citation la plus souvent utilisée pour justifier la prostitution...

Ces deux citations ont été largement utilisé par les théologiens et les moralistes du moyen-âge, puis jusqu'au début du XXe siècle, pour justifier une tolérance vis à vis du système prostitutionnel tout en continuant à stigmatiser les personnes prostituées.

Cependant, une fois évêque, Augustin a eu des paroles claires et fermes condamnant la prostitution comme institution, mais incitant à accueillir les personnes prostituées avec bienveillance, en leur proposant la conversion. Ces discours se basent, eux, sur des références scripturaires, et ne relèvent pas d'une opinion du temps.

source:
« Les Chrétiens et la prostitution »
Charles Chauvin
Cerf, Paris, 1983
p.21; p.56-60

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